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L'IO, l'avenir de l'IA grâce aux neurones humains?


L'intelligence organoïde (IO) est une évolution de l'intelligence artificielle (IA) qui s'appuie sur un réseau de neurones biologiques.

Utiliser une couche de neurones biologiques pour exploiter l'intelligence artificielle. L'idée semble sortir d'un film de science-fiction. Elle est pourtant sérieusement étudiée chez FinalSpark, une entreprise suisse.


Grâce à Sam Altman et tous ses (ex-)amis du milieu, l'intelligence artificielle commence doucement à exposer son incroyable potentiel. Mais si l'évolution fait rêver, elle a encore plus d'un aspect à améliorer. Notamment du côté de sa consommation énergétique. Sans surprise, quand on essaie de se rapprocher artificiellement des compétences d'un cerveau, cela demande une jolie quantité d'énergie. Si une IA parvient un jour à atteindre les performances d'un cerveau humain, il lui faudrait l'équivalent d'une petite centrale nucléaire pour tourner. De son côté, notre cerveau se contente, lui, d'une vingtaine de watts.


Depuis trois ans, FinalSpark, une entreprise suisse, a décidé de sérieusement s'attaquer au problème de cette consommation énergétique particulièrement importante. L'entreprise s'intéresse à l'intelligence organoïde (IO), une innovation qui pourrait bien être l'avenir de l'intelligence artificielle (IA). L'idée de base est la même. L'IO, comme l'IA, s'appuie sur un réseau de neurones. Via un long processus d'apprentissage, elle devrait être capable d'interagir efficacement avec des demandes humaines toujours plus complexes.


5.000 NEURONES

Actuellement, FinalSpark est parvenu à créer des organoïdes d'un demi-millimètre de long composés de 5.000 à 10.000 neurones.


La start-up helvète souhaite toutefois remplacer, au moins partiellement, les neurones artificiels actuellement utilisés par de véritables neurones biologiques. En reproduisant (partiellement) la structure d'un cerveau humain, la technologie profitera de son efficacité énergétique incroyable. "On peut espérer avoir besoin d'un million de fois moins d'énergie que pour l'IA", explique d'emblée le docteur Fred Jordan, un des cofondateurs de FinalSpark.  

Aujourd'hui, les recherches de l'entreprise ont déjà permis d'obtenir de premières avancées. "Actuellement, nous sommes parvenus à créer des organoïdes cérébraux avec des neurones humains et les faire interagir via des électrodes. (Ils ne parlent pas de cerveaux, car les neurones n'ont pas de conscience, NDLR.) Nos réseaux sont d'un demi-millimètre avec une structure composée de 5.000 à 10.000 neurones", précise le docteur Martin Kutter, l'autre cofondateur de FinalSpark.


Ces derniers ont été générés via des cellules IPS, ces cellules souches humaines  créées de toutes pièces à partir d'autres cellules de peau ou de sang. Découvert en 2012, ce protocole avait d'ailleurs valu à son initiateur le prix Nobel de médecine.  "Cela évite ainsi toutes les questions éthiques liées à l'utilisation de cellules souches primaires de fœtus ou de cordon ombilical", glisse le docteur Martin Kutter.


Le défi de la durée de vie des neurones


En travaillant avec des neurones biologiques, le premier défi pour FinalSpark fut de les garder vivants suffisamment longtemps. "Dans un premier temps, leur durée de vie ne dépassait pas quelques heures. On parvient désormais à les maintenir vivants plusieurs mois, ce qui est suffisant. L'idée est désormais de les faire travailler en réseau et d'effectuer des "sauvegardes" entre chaque organoïde, pour ne pas repartir de zéro à chaque fois qu'un organoïde meurt", explique Fred Jordan.


DOCTEUR FRED JORDAN COFONDATEUR DE FINALSPARK: "Nous sommes au même niveau de connaissances que ce que nous savions sur les ordinateurs quantiques il y a quinze ans."

Le cadre plus ou moins installé, le challenge désormais est de se lancer dans le très long processus d'apprentissage de l'intelligence mais aussi d'augmenter la taille des organoïdes. Aujourd'hui, leur IO est capable de stocker l'équivalent de 1 bit d'information. Autrement dit, presque rien. "Au niveau de la recherche, nous sommes donc encore à l'aspect fondamental. Nous sommes au même niveau de connaissances que ce que nous savions sur les ordinateurs quantiques il y a quinze ans", confie Fred Jordan.


Le défi d'agrandissement de leur réseau de neurones biologiques ne sera pas simple. "Une fois mis en culture, les neurones interagissent directement. Mais au-delà d'un certain nombre de neurones, une vascularisation du système est nécessaire, comme dans un cerveau humain. Sans ça, les neurones situés au centre se nécrosent trop rapidement", détaille le docteur Martin Kutter.


Travailler avec un aspect vivant est forcément particulièrement complexe. "À tout moment, notre organoïde peut mourir sans que l'on comprenne pourquoi. Nous sommes aussi tributaires des virus et bactéries, car notre réseau n'a aucune immunité." Avec une technologie aussi fragile, peu de chance de la voir un jour dans tous les smartphones. "Mais ce n'est pas vraiment un problème. Aujourd'hui, une bonne partie de ce qu'offrent les téléphones est justement traitée à distance."


Créer le gâteau avant de le partager


Avant d'aboutir à une première offre concrète, la recherche prendra encore des années. Au point qu'ils sont encore très peu nombreux à s'intéresser à l'IO. Actuellement, seules deux autres entreprises dans le monde se penchent sur le sujet. "Pour le moment, le marché n'est pas un gâteau que l'on se partage mais qu'on prépare", sourit Fred Jordan.


Aucun géant de l'IA n'a d’ailleurs commencé à étudier la question. "Presque aucun brevet n'a encore été déposé", confirme l'un des cofondateurs. "C'est la difficulté de la recherche fondamentale. Comme on ne peut pas espérer de revenus avant plusieurs années, les investisseurs sont encore très peu nombreux."


DOCTEUR FRED JORDAN COFONDATEUR DE FINALSPARK: "L'ambition est de lever jusqu'à 50 millions d'euros avec un minimum de 10 millions d'euros."

Jusqu'ici, FinalSpark a pu compter sur un budget d'environ deux millions d'euros, directement apporté par ses deux fondateurs. "En parallèle de ce projet, nous sommes les propriétaires d'AlpVision, une entreprise spécialisée dans la détection automatique de contrefaçon, via un logiciel sur smartphone. Comme l'entreprise fonctionne bien, elle nous a permis jusqu'ici de financer FinalSpark", explique Martin Kutter.


Pour poursuivre l'aventure, l'entreprise a toutefois besoin de passer à la vitesse supérieure. Ses deux fondateurs travaillent sur une première levée de fonds. "L'ambition est d'obtenir jusqu'à 50 millions d'euros avec un minium de 10 millions d'euros. Nous sommes six actuellement sur le projet. L'idée est d'atteindre rapidement une vingtaine de chercheurs pour faire des avancées significatives", glissent les entrepreneurs. Ils se donnent un an pour boucler le tour de table. "On pense à des investisseurs dans la deep tech et des institutions spécialisées dans la recherche fondamentale. La fondation Gates, par exemple", indique Fred Jordan.

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